24 mai 2020

Exercer en collège, lycée, CIO

Compte-rendu de l’audience Langues Vivantes du 5 mai

Cette audience avait été demandée par le SNES-FSU en janvier 2020 alors que les préparations de rentrée, en lycée particulièrement, annonçaient de nouveaux coups durs pour la diversité des langues et les conditions de travail des collègues. Elle a été redemandée à l’arrivée de la nouvelle Rectrice et suite à l’annonce de la validation du baccalauréat via le contrôle continu.

L’audience s’est déroulée en visioconférence. Quatre points ont été abordés en présence de deux IA-IPR, dont une en charge de la carte des langues et d’un représentant du secrétariat général de la Rectrice :
1 - Place des langues dans le contrôle continu validant le Baccalauréat 2020
2 - Diversité de l’offre en langues vivantes, notamment dans le cadre de la réforme du lycée
3 - Situation des LVC
4 - Cas de l’enseignement du turc

1 - Les langues vivantes dans le contrôle continu validant le Baccalauréat 2020
Nous avions adressé 4 questions à Mme la Rectrice :

  • Pour les élèves qui ont notifié une permutation de langues vivantes au moment de leur inscription à l’épreuve du baccalauréat, cette permutation est-elle validée dans le cadre du contrôle continu ? Auquel cas, l’élève validerait au titre de la LV1 et avec le coefficient appliqué à cette discipline des notes obtenues dans la LV2 ou la LV3.
  • La non-prise en compte de la permutation des langues vivante à l’inscription aux épreuves du baccalauréat est-elle légale ?
  • Que se passe-t-il pour les élèves inscrits dans une langue dont ils n’ont pas suivi l’enseignement dans un établissement ou pour des élèves inscrits au CNED qui n’auraient rendu aucun ou un seul devoir ?
  • Comment sera prise en compte la LV3 facultative à laquelle des candidats se sont inscrits ?

L’administration attend les préconisations du MEN sur la prise en compte des permutations de Langues et de la LV3 (précisions dans le courrier des IPR 7 mai). S’agissant des élèves n’ayant pas suivi l’enseignement de la LV dans l’établissement, s’ils relèvent du CNED, la note retenue sera celle donnée par le CNED.
En l’absence de note du CNED et pour les élèves n’ayant pas suivi l’enseignement de la langue dans un établissement scolaire, l’administration est en attente de précisions (discutées par l’Inspection Générale). Pour la prise en compte de la langue facultative, même réponse. Le jury d’examen est souverain mais pourrait disposer d’éléments d’analyse comme l’écart entre les moyennes au contrôle continu et les notes obtenues à l’épreuve terminale lors des sessions précédentes du baccalauréat.

2 - Diversité de l’offre : un abyme entre l’affichage et la réalité
Le SNES a interpellé l’administration sur l’offre très diversifiée mais totalement trompeuse, voire fausse de la carte des Langues du site académique.
13 langues vivantes sont affichées sans préciser le statut (LVA, B, C), la forme d’enseignement dispensé (dans l’établissement, par le CNED, dans le cadre d’un regroupement) et certains établissements n’affichent tout simplement pas certaines LVC enseignées. Une poule n’y retrouverait pas ses poussins !
L’espagnol serait ainsi présent dans 52 collèges et dans 24 lycées généraux et LEGT, autant que le binôme allemand-anglais. La réalité est pourtant différente.
L’italien est affiché dans 9 collèges et 28 lycées, dont le lycée Jean Monnet alors que son enseignement y a été supprimé l’an dernier. L’explication : 2 ou 3 élèves sont inscrits au CNED !
Il en va de même pour l’arabe, le portugais, et le turc, qui sont essentiellement enseignés dans le cadre du regroupement. Le turc est réellement enseigné dans 10 lycées, dont 2 ne sont pas affichés, et loin des 26 nommés sur le site !
L’administration explique que les personnels viennent de prendre leur fonction. La mise à jour du site a été faite pour les collèges mais est en cours pour les lycées. La carte sera terminée et affinée en tenant compte de nos remarques pour qu’elle soit précise, lisible et en phase avec le mode d’enseignement proposé dans l’établissement.

En réalité, cette carte reflète bien toute l’ambigüité de la politique des langues et l’écart entre une offre virtuelle et un enseignement réellement mis à mal sur le terrain. Et les réformes du collège puis celle du lycée sont autant de coups de massue.
Au lycée, La carte des spécialités de 1re illustre l’ampleur des dégâts....
En 2019-2020, dans l’académie, il y a 1903 élèves inscrits de 1re en spécialité LLCE anglais, 65 élèves en allemand, et 6 en italien.
Et ce ne sont pas les 1530 élèves inscrits en Abibac soit 4,4% de 2de à terminale qui peuvent cacher la diversité plus que squelettique.

Au collège, la diversité est décimée par le développement de l’enseignement bilangue allemand-anglais en 6e puis 5e qui se multiplie et bride l’accès à une autre langue.
L’italien LV2 a totalement disparu des collèges du haut Rhin !
Des moyens sont pourtant donnés aux établissements où une 3e langue vivante est enseignée. Or ces moyens ne sont pas attribués automatiquement mais sous forme d’ajustements après demande des chefs d’établissement. Le SNES-FSU demande que l’information sur cette dotation supplémentaire soit donnée à tous les chefs d’établissement, ce qui permettrait aussi d’éviter des remarques sur « le coût » des langues au moment où le Conseil d’Administration examine la répartition de la DHG.

3 - Situation des LVC
Depuis longtemps variable d’ajustement, la réforme du lycée risque de donner le coup de grâce à la diversité. Optionnelle, validée uniquement en contrôle continu, la LVC est perçue comme « peu rentable » pour le baccalauréat.
Si l’on ajoute à cela les moyens contraints calculés sur des groupes de 35 élèves, son sort dépend trop fortement de l’autonomie laissée à l’établissement ; ici, la LVC n’est pas accessible aux élèves inscrits en Abibac, là, elle est « maintenue » mais les élèves « en nombre insuffisant », doivent s’inscrire au CNED, malgré la présence d’un professeur (qui enseigne les LVA et/ou B) ou alors l’horaire officiel n’est pas respecté. Cette gestion aléatoire et révisable chaque année ne respecte même plus le cadre réglementaire. Et sur le terrain, la diversité fond comme neige au soleil.
L’administration dit être consciente de ces risques et vouloir soutenir les langues à faible diffusion.
Ainsi, le rectorat n’a pas suivi les collèges ayant demandé de passer au tout bilangue allemand-anglais à la rentrée 2020 sans autre choix de LV pour ne pas entraver les affectations d’élèves venant d’autres académies et pour préserver la diversité.
Le SNES-FSU demande que dans tous les lycées, l’information sur la possibilité de permutation de LV soit clairement transmise aux CE dès le début de l’année pour que les demandes à l’issue de la 2de soient actées à temps. Il est donc impératif que les élèves soient informés de ce droit pour que le chef d’établissement fasse remonter les besoins réels d’ouvertures de l’établissement.

4 - Situation de l’enseignement du turc
Le SNES–FSU alerte depuis de nombreuses années sur les enjeux de cet enseignement dans l’académie de Strasbourg.
Conséquences de la réforme Blanquer, le turc devient essentiellement LVC et risque de disparaître des écoles de la République, offrant ainsi un boulevard aux écoles privées hors contrat.
Le SNES-FSU demande à l’institution de prendre la pleine mesure des enjeux éducatifs et politiques réels.
Dans le 2d degré, le nombre d’enseignants, insuffisant dans l’académie de Strasbourg (comme sur tout le territoire), ne permet pas de répondre aux besoins réels et d’assurer un enseignement dans des conditions satisfaisantes. A ce jour, aucun collège n’offre le turc. Seuls 10 lycées- sites de regroupements de 5-7 établissements- dont 2 n’affichent cet enseignement ni sur le site ni dans l’établissement- offrent l’enseignement du turc, loin des 26 lycées affichés (voir remarques supra sur la carte des LV trompeuse). Pourtant le nombre de candidats - 2000 cette année - illustre les besoins.
Les conditions d’enseignement comme pour tous les regroupements, sont difficiles : des horaires insuffisants, et des regroupements d’élèves ayant des parcours et des examens différents. Et des heures qui ne sont pas pérennes. Des collègues ont perdu et continuent de perdre beaucoup d’heures. Que deviendront-ils ?
Le financement est une difficulté majeure, largement insuffisant, jamais pérenne. Sans évolution rapide le turc disparaîtra de nos lycées publics. Pour autant la demande des familles ne disparaîtra pas. Les élèves ignorés par nos établissements publics, lieu d’intégration et de formation citoyenne seront accueillis par des établissements confessionnels comme Ditib Younes Emre à Hautepierre. D’éducative, la question devient politique
Le SNES-FSU demande qu’à l’aune des enjeux exposés, ce dossier soit traité par la rectrice et le ministre.
Il demande dans l’immédiat,

  • que le financement soit pérennisé dès la rentrée 2020,
  • que les heures soient accordées au regard de la LV suivie dans les regroupements afin de pouvoir assurer les programmes, soit au-delà des 55h-60h,
  • que l’autorisation d’ouvrir une LVB soit de fait donnée par la rectrice aux établissements dès lors que les élèves inscrits en LVC demandent la permutation pour LVB dans le respect des délais réglementaires.
    Il serait opportun de proposer un cadre permettant aux enseignants de LV dites rares en sous service d’assurer des heures à la hauteur de leur service, dans les établissements.
    La rectrice précédente avait été alertée par le chargé de langue turque, M De Tapia, et avait demandé qu’il la tienne informée.

L’administration va voir où en est l’enveloppe spécifique et transmettra nos remarques et demandes à la rectrice. Selon elle, aucune demande d’ouverture n’a été déposée ; et de toute façon, tout est déjà bouclé pour cette rentrée 2020. C’est un dossier sensible qui sera suivi et présenté au CTA de rentrée.

Le SNES-FSU porte ce dossier depuis plusieurs années et demande à être informé des orientations qui seront prises.