Pendant la pandémie, la casse se poursuit, à rebours des propos sur la priorité donnée à l’école et la reconnaissance de l’utilité du service public.
C’est d’abord le caractère national de l’éducation qui ne cesse d’être remis en cause. Nous l’avons déjà largement documenté et dénoncé mais le renvoi à une gestion locale s’est accentué à l’occasion de la crise sanitaire. Nous ne citerons que deux exemples récents. Le premier concerne le passage à des effectifs allégés en lycée. Faute de cadrage national, celui-ci s’est traduit par presque autant d’organisations que d’établissements. Or, face au refus du ministre de repousser les épreuves du baccalauréat en juin et sous la pression de programmes qui n’ont pas été allégés, certains lycées (une moitié de ceux pour lesquels nous avons eu des retours) font désormais le choix de revenir à une présence des élèves de terminale à 100%. Les arguments évoqués sont l’impossibilité de couvrir le programme mais aussi le fait que d’autres établissements, en particulier ceux du privé, ont conservé des cours en présentiel pour tous leurs élèves. Le ministre, lui, répond par une mesure qui s’apparente à une nouvelle provocation : demander à des collègues déjà profondément éprouvés d’organiser des stages de vacances pour approfondir ou réviser certains points des programmes de spécialité. Il semble que pour le ministre, l’urgence soit au sauvetage de « sa » réforme quoi qu’il en coûte aux élèves et aux personnels. Le deuxième exemple se situe au niveau du collège. Le caractère facultatif du stage se traduit ici par une annulation, là par un maintien pour quelques élèves, en lien notamment avec leur projet d’orientation. Ailleurs encore, les élèves sont vivement incités à trouver un stage et les enseignants à les accompagner dans leurs démarches.
Dans tous les cas, ces choix différents ont des conséquences sur le nombre d’heures de cours pour les élèves et portent une rupture d’égalité entre eux. Pour la FSU, il est urgent de revenir à une éducation vraiment nationale, seule à même de garantir l’égalité entre les élèves, sur tout le territoire.
Nous dénonçons aussi la défiance à l’encontre de l’EPS. Sans chiffre sur d’éventuelles contaminations, sans réalité scientifique, cette discipline est montrée du doigt. "Les cours d’EPS se feront dehors !" Rappelons qu’un gymnase type C fait au moins 800m2 et même en y concentrant 3 classes (donc dans des conditions déplorables et contraires au guide du Ministère de l’Education Nationale), il y a toujours plus de 8m2 par élève contre 2 à 3m2 par élève dans une salle de classe ordinaire... Passons l’habituelle soudaineté de l’injonction (repères EPS divulgués le dimanche soir à appliquer le lendemain) et voyons la réalité des établissements : les espaces extérieurs sont enneigés, occupés pour les récréations, les élèves sont peu ou pas équipés, le danger de glissades important, le froid intense... Et surtout la réalité de cet enseignement est ignorée de nos chefs d’établissements, réduite à de l’activation facultative, bien loin de la riche acculturation proposée en temps normal. Les temps banalisés pourtant indispensables pour trouver des solutions sont ardus à obtenir et relèvent du seul échelon local. Serinée durant toute la pandémie y compris par vous, Mme la Rectrice, la nécessité de l’activité physique pour nos élèves est écrasée, balayée, oubliée. Le protocole « renforcé » l’est au détriment des élèves. Pour la FSU, la solution est bien de rouvrir les installations sportives et de proposer des demi-groupes pour tous et toutes.
Et puisque nous sommes réunis pour examiner la préparation de rentrée, celle-ci nous offre un autre aperçu de la détérioration des conditions de travail des personnels et des élèves. Dans le 2d degré, ce sont 43 emplois d’enseignants supplémentaires qui devraient être supprimés pour 0,7% d’élèves en plus. Et ce sont les lycées qui paient le prix fort avec une nouvelle baisse du H/E tandis que la part des HSA grimpe à près de 15% (contre 13,5% lors de la préparation de la rentrée 2020 et un peu moins de 11,5% dans le constat de rentrée). Ce que le ministère affiche comme une compensation des postes perdus n’est donc que de l’affichage politique, un leurre qui augure de difficultés accrues sur le terrain avec des effectifs de classes et de groupes en hausse et d’une nouvelle réduction de l’offre d’options.
Par ailleurs, comme chaque année, aucune création de postes de CPE, d’assistants sociaux, psychologues, personnels de santé scolaire, d’agents administratifs n’a été prévue alors que tous jouent un rôle indispensable dans les établissements, auprès des élèves.
Quant à l’Education prioritaire, nous nous interrogeons sur les moyens spécifiques pour les collèges REP et REP+. Alors que ceux-ci bénéficiaient d’une dotation supplémentaire de 18h, les documents évoquent une dotation de 9h pour les seuls collèges REP et une enveloppe de 297h à répartir en fonction « des besoins et spécificités des collèges concernés ». Nous nous inquiétons de ce qui pourrait être l’introduction d’une part de contractualisation, dans la ligne des Contrats Locaux d’accompagnement expérimentés dans les académies d’Aix-Marseille, Lille et Nantes. La FSU se mobilisera contre tous les projets qui iraient dans le sens du démantèlement de l’éducation prioritaire, alors que l’enjeu, plus encore dans cette période de crise sanitaire qui se mue en crise sociale, est de déployer une politique d’éducation prioritaire plus ambitieuse et d’élargir la carte actuelle en toute transparence aux établissements dont les critères sociaux et scolaires en relèvent aujourd’hui, notamment à certains lycées.
Toutes les réformes qui ont diminué les heures de cours, le manque d’investissement dans l’éducation comme dans l’ensemble des services publics, ne sont pas sans effet. Dans un courrier de décembre, vous vous inquiétez, Mme la Rectrice, des faibles résultats des élèves de notre académie en lecture. On pourrait y ajouter les résultats non moins inquiétants en mathématiques. Vous proposez des pistes de travail, comme le soutien au Quart d’heure lecture qui empiète sur les heures d’enseignement de toutes les disciplines et dont le bilan reste à faire. Pour nous, il est bien plus urgent de mettre l’accent sur une formation initiale et continue de qualité, sur la revalorisation des salaires à tous les échelons de la carrière et donc le dégel du point d’indice, sur la diminution des effectifs des classes, sur le remplacement des collègues absents.
C’est d’ailleurs pour défendre un autre projet pour l’école, pour nos salaires et nos conditions de travail que nous serons en grève le 26 janvier.
21 janvier 2021