Le plan de formation pour la réforme du collège incluait trois journées de formation numérique. Nous y voilà. Ce plan de formation se déroulera jusqu’à la fin de l’année scolaire et se décline différemment selon les académies. Dans celle de Strasbourg, une seule journée de formation en présentiel est obligatoire, les deux autres peuvent être, au choix de chacun, des formations en présentiel ou à distance. Les formations en présentiel se dérouleront principalement le mercredi après-midi. Les collègues peuvent choisir les formations qu’ils souhaitent. Pour faciliter ou orienter ce choix, il leur est demandé de répondre à un questionnaire visant à établir un profil, avant le 20 novembre ; après quoi un panel de formations leur sera proposé, dans lequel ils feront leur choix. S’ils sont inscrits à une formation numérique au PAF, elle sera prise en compte.
S’il paraît indispensable d’être formé au numérique pour pouvoir l’utiliser en classe avec nos élèves, ce plan de formation soulève cependant plusieurs questions et réflexions :
– Pour le SNES FSU, les formations doivent se dérouler sur le temps de travail ; les formations à distance posent le même problème puisqu’elles empiètent sur le temps personnel.
– Si le numérique est un outil séduisant, il est aussi extrêmement chronophage et créer soi-même toutes les ressources à mettre à la disposition des élèves peut prendre beaucoup de temps. Il peut certes être tentant de se faciliter la tâche en récupérant sur internet du matériel « prêt à l’emploi », mais sera-t-il forcément pertinent ?
– Quid de l’équipement informatique et de la maintenance dans les établissements ? Est-il réellement possible de travailler efficacement avec nos élèves en salle informatique, d’avoir une (bonne) connexion internet ?
– Accentuer la place du numérique dans les apprentissages et le travail personnel des élèves suppose aussi que les familles soient suffisamment équipées : à la maison, chaque membre d’une fratrie aura-t-il les conditions matérielles pour faire ses devoirs ? L’usage massif du numérique peut donc cimenter voire aggraver les conséquences des inégalités sociales.
– Notre métier risque aussi de changer, à long terme, si la part du numérique s’accroît : de concepteur de son métier et de sa pédagogie, le professeur peut devenir simple répétiteur. Des dispositifs comme la « classe inversée » portent cette dérive en filigrane. De même, ne perdons pas de vue que l’augmentation de la productivité des enseignants a toujours été l’horizon inavoué du déploiement des nouvelles technologies à l’école. Pour être concrets : plus de cours sur ordinateurs mais moins de profs devant les élèves avec une charge de travail accrue.
– Quelle est l’efficacité du numérique ? Aucune étude ne la démontre. Le rapport PISA 2015 de l’OCDE, pourtant pro-numérique, révèle même que plus on est exposé aux écrans, moins on comprend les textes écrits.
– Le numérique doit demeurer un outil et ne pas être considéré comme la solution miracle à tous les maux de l’école, comme a trop souvent tendance à le laisser penser la communication du ministère. Les neurosciences dénoncent la surexposition des enfants aux écrans, source d’hyperactivité, de troubles du sommeil, de mal-être, et l’Education nationale veut encore ajouter du temps d’écran ?
Alors bien-sûr, il faut vivre avec son temps ; bien-sûr il faut éduquer nos élèves aux nouvelles technologies et aux dangers d’internet. Mais il faut laisser le numérique pour ce qu’il est : un outil au service d’un objectif pédagogique, pas une fin en soi ou une solution magique. Restons vigilants à maintenir une formation de qualité pour nos élèves en ne cédant pas aux sirènes du tout ludique, tout en veillant à préserver nos conditions de travail.
N’hésitez pas à contacter la section académique pour toute question supplémentaire ou problème rencontré.
Le SNES FSU de Strasbourg déposera des préavis de grève pour couvrir les collègues qui ne souhaitent pas se rendre aux formations hors temps de travail.